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Photo du rédacteurElisa Fauvernier

Inventaire faunistique de la forêt d’Ambohifamotsy, l’un des derniers refuges d'une faune endémique

Depuis 2019, Cœur de Forêt s’engage à la restauration d’un écosystème forestier de 1000 ha dans un nouveau site malgache à Ambohifamotsy. Le travail sur le terrain a débuté par la plantation de 2 millions d’arbres d’essences locales et forestières. L'année dernière, Cœur de Forêt a décidé d’aller plus loin sur la préservation de la faune du site. Ainsi, en décembre 2021, nos équipes terrain ont réalisé un inventaire faunistique sur au sein de la forêt d’Ambohifamotsy.


Équipe terrain de l'inventaire faunistique


Ce travail d’inventaire biologique consiste à mettre en exergue la richesse faunistique de la forêt d’Ambohifamotsy pour mieux accompagner le développement des populations locales tout en préservant cette biodiversité inestimable. Ces connaissances scientifiques viendront consolider la préservation du patrimoine naturel de cette région.

🌳 La forêt d’Ambohifamotsy, un abri pour la faune malgache

La forêt d’Ambohifamotsy fait partie des derniers vestiges forestiers du paysage oriental de Madagascar. En plus des services écosystémiques (séquestration de carbone, réserve d’eau et protection du sol) qu’elle procure, elle constitue l'habitat naturel de multiples espèces faunistiques et conserve aussi des ressources génétiques considérables pour la conservation des espèces végétales et la reforestation de la zone périphérique de cette forêt.


Site d'étude de l'inventaire


La forêt d’Ambohifamotsy est située à proximité de la ville d’Antalaha et de la commune d’Ambohitsara. Le site d’étude est localisé dans le domaine de l’Est et est caractérisé par une végétation de forêt dense humide de basse altitude. Pour visualiser la zone d’étude sur Google Maps, vous pouvez renseigner les coordonnées géographiques suivantes : S14° 56’ 16.1’’, E50° 11’ 19.8’’, point où notre équipe a installé son campement pendant la réalisation de l'inventaire.

🐾 Un grand nombre d’espèces endémiques

recensées

Grâce aux méthodes d’inventaire standards utilisées, 80 espèces ont été inventoriées dans la forêt d’Ambohifamotsy dont 6 d'amphibiens, 19 de reptiles, 44 d'oiseaux et 11 de mammifères. Sur les 80 espèces recensées, 59 espèces sont des espèces endémiques de Madagascar. 18 espèces d’oiseaux sont même endémiques de la région Ouest de l’Océan Indien et seulement trois espèces sont introduites : la pintade Numida meleagris, le rat Rattus rattus et la musaraigne Suncus etruscus.

Pour l’herpétofaune (les amphibiens et les reptiles) et l’avifaune (les oiseaux), le plateau étudié n’est jamais atteint, signifiant qu’il pourrait y avoir d’autres espèces sur ce site, mais pas encore recensées. Pour les lémuriens, le plateau est atteint uniquement vers le quatrième jour de recensement.


Dans l’ensemble, les espèces inventoriées sont représentées par un faible nombre d'individus, elles sont réparties dans les catégories à faible abondance. En effet, plus de 70% des espèces sont regroupées dans les catégories « espèce rare », « espèce occasionnelle » et « espèce assez fréquente ».

Mais surtout, l'étude aura permis de recenser 9 espèces menacées (selon la liste rouge de l’IUCN : CR, VU, NT). Parmi ces espèces, une seule est classée comme à préoccupation majeure : c’est le Fossa Cryptoprocta ferox, espèce vulnérable selon l’IUCN.



Oiseaux :

44 espèces d’oiseaux ont été inventoriées dont plus de la moitié sont endémiques de Madagascar et le reste endémiques de la région Ouest de l’Océan Indien. La forêt d’Ambohifamotsy accueille une avifaune importante dont certaines sont menacées et inscrites selon la liste rouge de l’UICN et l’Annexe II de la CITES.


Amphibiens et Reptiles :

Un total de 25 espèces dont 6 d'amphibiens et 19 de reptiles ont été recensées et toutes ces espèces sont endémiques de Madagascar. Le Phelsuma masohoala, un petit gecko tacheté est même endémique de la région et se rencontre uniquement entre Antalaha et Cap Est dans la région de Masoala.

Parmi ces espèces, trois sont considérées comme menacées par la liste rouge de l’UICN et 10 espèces ont un statut de commercialisation CITES dont notamment deux espèces de Boa (Acrantophis madagascariensis et Sanzinia madagascariensis).


Mammifères :

L’inventaire a permis de recenser 11 espèces de mammifères dont 9 sont endémiques de Madagascar. La majorité des espèces de mammifères endémiques inventoriées sont à préoccupation mineure hormis le Fossa Cryptoprocta ferox, le plus gros mammifère carnivore de Madagascar aux allures félines qui est classé comme espèce vulnérable par l’IUCN. Plusieurs lémuriens, espèces emblématiques de Madagascar, ont été inventoriés : on retrouve le Microcèbe Microcebus sp., le Grand Chirogale (Cheirogaleus major), l'Hapalemur gris occidental (Hapalemur occidentalis) et le Lémur à front blanc (Eulemur albifrons). La majorité de ces lémuriens sont diurnes, le restant est nocturne.



🪵 Les menaces qui pèsent sur la forêt d’Ambohifamotsy

Les Brûlis :

Les pressions sur le couvert forestier augmentent considérablement, particulièrement à proximité des villages. L’élargissement des zones de culture agricole est la source principale de cette déforestation. Au sein même des sites visités, les équipes ont fréquemment rencontré des terrains de cultures sur brûlis. Les zones de culture y gagnent du terrain et se rapprochent de plus en plus du cœur de la forêt. Dans les fragments de forêt visités, de plus en plus de champs de culture de la vanille s’installent au voisinage immédiat, voire même à l’intérieur de la forêt.

Coupes sélectives et illicites de bois :

Des coupes des bois ont été observées dans tous les fragments de forêts visitées. Les bois collectés sont principalement transformés en planches ou en bois carrés qui sont utilisés dans la construction des habitations. Ils sont vendus localement ou exportés dans d’autres villages dont les communes d’Ambohitsara.


Si les lémuriens sont parfois chassés pour leur viande par des populations pauvres, aucun piège à lémuriens n’a été observé sur le site.

Les interventions humaines sont essentiellement liées aux pratiques agricoles et ont des impacts considérables sur les espèces faunistiques. Elles modifient la structure de leur habitat et la disponibilité en ressources alimentaires de ces animaux. Ainsi, la survie de nombreuses espèces endémiques de l’île et présentent dans la forêt d’Ambohifamotsy, est activement menacée par l’expansion des activités humaines. Il est urgent de les préserver en renforçant les activités de conservation dans la zone.

📋 Notre stratégie de préservation : la forêt d’Ambohifamotsy, lieu prioritaire de conservation

Nous avons sélectionné 7 espèces phares et prioritaires identifiées grâce à l’inventaire

faunistique :

  • Oiseaux : le Râle de Madagascar (Rallus madagascariensis) (VU, E), l’Ibis huppé (Lophotibis cristata) (NT, E)

  • Reptiles : deux espèces de geckos le (Uroplatus giganteus) (VU, E), et le (Phelsuma masohoala) (CR, ER)

  • Lémuriens : le Lémur nain (Cheirogaleus sp. aff. Major) (VU, E), l'Hapalemur gris occidental (Hapalemur occidentalis) (VU, E), et le Lémur à front blanc (Eulemur albifrons) (VU, E)

Ces espèces ont été identifiées parmi les neuf espèces menacées suivant la classification par l’UICN. Ambohifamotsy étant l’un des derniers habitats qui abrite ces espèces, préserver la forêt contribue significativement à la conservation à l’état naturel de ces espèces menacées.

La forêt d’Ambohifamotsy constituant l’un des derniers vestiges de “forêt humide de basse altitude” caractéristique de la région Atsinanana, la forêt entière doit être une cible prioritaire de conservation. Les mesures de conservation se focaliseront sur la stabilisation de la lisière forestière, la réduction du prélèvement de bois et sur l’élargissement de la forêt par reboisement.

Cependant, la réduction de la collecte des bois nécessite une ressource alternative de bois de construction pour ne pas laisser les populations locales sans alternatives. Le plan d’action devra ainsi inclure la plantation des arbres à croissance rapide pour répondre à ce besoin.


Forêt d’Ambohifamotsy


Afin de lutter contre le défrichement de la forêt, des initiatives de restauration forestière à l’intérieur de cette forêt permettront de conserver et de protéger de façon durable ces écosystèmes.

Le succès de l’action mis en oeuvre requiert un appui technique de la communauté locale, un soutien de la population au développement. Cette coopération étroite est importante pour pérenniser le projet, notamment avec les anciens propriétaires des champs de culture abandonnés. La mise en place d’une gestion de l’utilisation des sols pour l’agriculture est également envisageable afin d’éviter la propagation de nouvelles zones de brûlis.

Notre action sur le terrain vous intéresse et vous voulez soutenir la préservation de la forêt d’Ambohifamotsy et protéger les espèces endémiques qu'elles abritent ? Faites-un don pour soutenir nos actions et/ou parrainez un arbre notre projet Madagascar Masoala.

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