Portrait : Alain Gillant, a hérité d'un domaine forestier familial, il témoigne
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  • Photo du rédacteurElisa Fauvernier

Portrait : Alain Gillant, a hérité d'un domaine forestier familial, il témoigne

La semaine dernière, nous lançions notre nouvelle campagne de crowdfunding ("financement par la foule" en français 😉) en soutien au projet France Lot. Il est urgent de préserver les forêts françaises, nous vous en parlons dans nos articles consacrés au contexte et aux enjeux qui touchent nos forêts.


Mais, pour vous présenter le projet Cœur de Forêt France Lot, qui de mieux placé que les propriétaires forestiers que nous accompagnons pour témoigner ?


Aujourd'hui, partons à la rencontre d'Alain Gillant, propriétaire d'un bois dans le Lot :


Comment avez-vous découvert l'action portée par Cœur de Forêt localement ?

"Tout à fait par hasard. En septembre 2019 j’ai organisé une réunion sur les investissements du chauffage au bois du couvent de VAYLAS (Lot) et monsieur CHEVAL (Anthony Cheval, coordinateur local du projet France) était présent. Il m’a présenté Cœur de Forêt et nous avons gardé contact".

Avant de rencontrer Cœur de Forêt comment vous impliquiez vous dans vos bois ?

"En fait, je ne m’impliquai pas du tout. J’allais dans les bois de la famille et je coupais n’importe quoi pour faire des buches pour le chauffage. Quelques fois des arbres pas trop gros, comme ça cela m’évitait d’avoir à refendre, et des arbres bien morts sur pieds ou à terre.

Puis un jour j’ai rencontré par hasard un technicien du CNPF du Lot qui est venu bénévolement une demi-journée pour que nous parcourions ensemble plusieurs parcelles boisées. Il m’a montré toutes les erreurs que j’avais faites en m’expliquant à chaque fois ‘’le pourquoi’’. Il m’a fait découvrir la vie du territoire que je ne soupçonnais pas :

- Les quelques chênes plusieurs fois centenaires et exceptionnels que moi je ne voyais ‘’que comme beaux’’.

- Les tapis de pousses d’arbres qui assurent les régénérations et qu’il faut protéger.

- Des essences d’arbres rares pour les sites quercynois que j’ai croisées souvent sans leur prêter toutes les attentions qu’elles méritent.

- La vie des insectes dans les bois morts et les nids de certains oiseaux dans des arbres morts.

- Les taillis qu’il fallait préserver pour la faune sauvage.

Avant de se quitter, il m’a conseillé 3 livres sur les arbres que j’ai lus sans attendre. En fait, il a éveillé en moi une prise de conscience. J’ai tout de suite regardé les arbres d’une façon plus attentive et j’ai commencé à me poser des questions sur l’univers local des arbres pour lesquels je n’avais pratiquement aucune réponse. Ensuite le contact et les premiers échanges avec les représentants de Cœur de Forêt ont été pour moi le démarrage de mon "implication forestière".

Si vous aviez à résumer les apports de l'équipe de Cœur de Forêt par rapport à votre vision de la forêt, que diriez-vous ?

"Les échanges avec l'équipe de Cœur de Forêt ont été chaque fois extrêmement instructifs. Avec des mots simples, ils m’ont apporté un éveil, une formation technique sur les vies des différents arbres et une approche environnementale nouvelle et passionnante.

Je ne pensais pas qu’il y eut autant à voir, à ressentir, à faire, à ne pas faire sur des lieux où j’aimais quand même me promener, où je me sentais bien, sans plus.

Un exemple : Un jour où je recevais messieurs CHEVAL et SANTUNE (Abel Santune, ancien responsable du projet France Lot), nous marchions sur un chemin et tout à coup ils se sont tous les deux émerveillés devant un alignement d’arbres long de 500 mètres environ qui descendait une combe.

Moi qui avait vu cet alignement plus de cent fois sans me poser de question, j’ai demandé ce qu’il y avait de si particulier à mettre en avant sur ces arbres.

Ils m’ont expliqué : "nous sommes sur le causse, un sol sec qui convient aux érables et aux chênes pubescents. Ces arbres devant nous sont des frênes qui ont besoin d’eau pour se développer, ce qui veut dire que dessous il y a un écoulement hydraulique."

Ça alors…

Lorsque monsieur Cazes (Technicien forestier indépendant partenaire de Coeur de Forêt) est venu pour faire le diagnostic de propriété je l’ai accompagné et chaque fois qu’il faisait quelque chose il me l’expliquait.

J’ai lu plusieurs fois son rapport afin de comprendre et retenir les données techniques décrites. Je m’y réfère chaque fois que je me pose une question.

Quand il est revenu pour sélectionner les arbres à abattre et ceux à protéger, cela a été une nouvelle formation pas aussi facile que ce que je croyais : Pourquoi celui-là et pas celui-là pas ? Et ceux-là pourquoi on les laisse tranquille ?…

Les échanges avec messieurs CHEVAL, VEILLE (Frantz Veillé,Technicien forestier du projet) ont aussi tous étés instructifs et je peux les contacter si j’ai besoin d’un avis ou d’une aide.

Je sais maintenant que j’ai à m’investir un minimum pour entretenir les bois et permettre à certains arbres de se développer".

- Vous avez bénéficié d'un diagnostic de propriété, en quoi ce travail sur le long cours vous motive-t-il à vous investir dans vos bois, vous fait-il percevoir différemment votre propriété ?


"Donc tout ça pour quoi faire ?

D’abord, ces parcelles boisées sont le fruit du travail des générations anciennes de ma belle-famille qui se sont investies avec des petits moyens agricoles. Pour exemple, avant d’acquérir son seul petit tracteur d’occasion (de 1959) en 1965, mon beau-père labourait les champs à la charrue tirée par des vaches. Les hommes et les femmes agriculteurs sur le causse quercynois n’ont pas eu la vie facile.

Alors, je me dis que ce patrimoine familial plein de sueur doit être protégé et transmis aux futures générations en espérant qu’elles s’impliquent à leur tour.

Et tout cet ensemble d’accompagnements et de sentiments me motive, me plait, me donne une raison écologique basique, terre à terre (ou plutôt terre à cailloux…). Restons simple et pas compliqué.

J’ai envie de m’investir en fonction de mes moyens, de me passionner. Je me suis donné un but, un idéal même qui ne me décevra pas. Et à mon âge...

Je sais que je ne fais pas un investissement pour m’enrichir pécuniairement.

Mais déjà chauffer la maison avec mes bûches, cuisiner quand la cuisinière est allumée et peut être dépanner localement quelques foyers, c’est pas mal".

En quoi un territoire forestier comme le Lot, avec déjà de nombreux acteurs historiques présents autour de la forêt, a-t-il besoin des aides financières et techniques proposées par l'association Cœur de Forêt localement ?

"Certes, il y a des organismes historiques qui apportent des conseils ou des aides financières, mais les contacter pour avoir des retours n’est pas toujours évident.

Actuellement, ces organismes n’interviennent que dans le nord du département et pas dans le sud, ils ne couvrent pas tout le département.

Sans se placer dans un contexte de concurrence, Cœur de Forêt a toute sa place pour se positionner et être actif là où les autres organismes n’interviennent pas. Et il y a de quoi faire…

Par ailleurs, il me semble que Cœur de Forêt a besoin de se faire connaître, et a besoin de montrer ce qu’il sait faire et dans quel contexte."

Autres points que vous souhaiteriez mettre en évidence par rapport à votre relation et au travail avec l'équipe locale ?

"Le premier point à mettre en évidence dans ma relation avec l'équipe locale, c'est de développer le relationnel, à savoir demander certes, mais aussi faire remonter mes observations et les suivis que j’aurais effectués dans les plans d’actions qui m’ont été proposés.

Par exemple, suite aux marquages d’arbres effectués par monsieur Cazes, j’ai élaboré un plan d’organisation que j’ai commencé de mettre en place :

- J’ai repéré quelques arbres faciles à abattre.

- Je veux les débiter pour en faire des buches bois de chauffage.

- Donc il va falloir que je stocke dans un endroit approprié pour faciliter le séchage sur 2 ans et gérer les dates de coupes.

- Et bien j’ai déjà monté des abris couverts avec des palettes de récupération.

- Maintenant, je dois entreposer et remplir les abris.

Je ne ferais pas tout en une année, mais je dois mettre en place un calendrier d’actions à mener".


Un grand merci à Alain Gillant pour son témoignage et son implication pour préserver ses forêts durablement.


Vous avez envie de soutenir nos actions auprès des propriétaires forestiers pour préserver la forêt française ? Découvrez notre campagne “Connaître pour préserver les forêts françaises” les contreparties que nous vous y proposons, et participez-y pour nous aider à atteindre notre objectif de collecte de 2000 € !



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