A l'occasion de la consultation publique organisée par le Ministère de la Transition écologique et solidaire concernant le projet de décret et d'arrêté portant sur la création d'un label Bas-Carbone en France, Coeur de Forêt s’est exprimé sur ce mécanisme qui pourrait être moteur pour les forêts françaises mais qui n'est pour le moment pas assez abouti pour valoriser leur capacité d'absorption en CO2 tout en garantissant une gestion durable.
Pour consulter le projet de décret et d'arrêté : c'est par ici.
La réponse de Coeur de Forêt
" L'association Cœur de Forêt salue l'initiative d’une première consultation publique concernant la mise en place d’un label Bas-carbone qui permet de valoriser, le service de stockage de carbone, assuré par les forêts françaises. Nous saluons également la présence d’associations telles que le Groupe Énergies Renouvelables Environnement et Solidarités, le Réseau Action Climat et France Nature Environnement au sein du comité consultatif prévu et essentiel aux prises de décisions de la Direction générale de l’énergie sur le fonctionnement du label « Bas-Carbone », la validation des méthodes et projets ainsi que de leurs évolutions potentielles.
D'une manière générale, nous percevons dans la création du label Bas-Carbone, un outil de financement intéressant pour la forêt française, afin de lui permettre de répondre aux problématiques actuelles qu'elle rencontre. Cependant, à l'image des premiers projets d'émissions de Crédits Carbone générés dans le cadre du Protocole de Kyoto, nous nous inquiétons des dérives qui peuvent en découler en focalisant les quantités d'émissions de réduction sur un aspect purement "carbone", au détriment d'une gestion forestière pérenne.
Pour garantir une gestion durable des forêts, Cœur de Forêt demande :
- Que les notions d’impacts sociaux et environnementaux soient précisées, ainsi que l'inclusion obligatoire de la réalisation d’un diagnostic forestier (avec prise en compte de la qualité des sols et de la biodiversité) dans toutes les méthodes liées à des projets forestiers.
Une démarche incitative à titre réglementaire pourrait également limiter la conversion de peuplements de feuillus (ou mixtes) en peuplements exclusivement résineux (plus productifs, pompes à carbone) ou inciter les propriétaires à conserver des arbres morts ou des îlots en n’autorisant la labellisation du Projet qu’à partir d’une certaine note de l’Indice de Biodiversité Potentielle (IBP) maintenue tout au long du Projet.
- Que la quantification des émissions de réduction anticipées ou effectuées prenne obligatoirement en compte le devenir des produits forestiers. En effet, la valorisation des produits forestiers à destination de la filière bois énergie reste possible, ce qui impliquerait un rabais important dans la comptabilisation des émissions de réduction. Malgré l’intérêt de substituer les énergies fossiles par des énergies renouvelables telles que le bois, le risque n’est-il pas d’accentuer la problématique du bois-énergie face aux autres débouchés possibles pour le bois ? Certains taillis de châtaignier, par exemple, pour une rentabilité à court terme, ne seront-il pas systématiquement conduit pour du bois de chauffage (facilité de calcul / modélisation, facilité de travaux, remboursements rapides) plutôt que conduit en vue d'améliorer la forêt avec des perspectives de bois d’œuvre ?
- Que la durée de validité des projets forestiers soit plus clairement établie et non uniquement indiquée comme supérieure à celle prévue par le référentiel (5 ans).
De plus, dans le contexte de morcellement des forêts, nous observons le fonctionnement du label tel qu'exposé difficilement accessible aux propriétaires de petites surfaces de forêts et les amenant peu à réfléchir à leur type de gestion forestière. Les coûts de l'audit reste une inconnue importante pour le dimensionnement des Projets.
La clarification de ces éléments permettrait de confirmer la dynamique voulue par ce label Bas-Carbone : un outil de financement pour accompagner les forêts françaises aux évolutions du Climat de demain en accord avec une gestion pérenne de nos forêts, par une vision globale des objectifs environnementaux (carbone mais aussi biodiversité, protection de l'eau …), sociaux (patrimoine, histoire ...) et économiques (valeur ajoutée).
Nous espérons que nos commentaires seront pris en considération et nous restons ouverts à tous échanges avec les acteurs engagés dans ce processus de construction ."