Rapport Annuel 2021 : Projet Madagascar Masoala [2/2]
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  • Photo du rédacteurElisa Fauvernier

Rapport Annuel 2021 : Projet Madagascar Masoala [2/2]

Dernière mise à jour : 18 oct. 2022



Partie 2 : Inventaire


La situation géographique du projet de restauration forestière n’a pas été choisie par hasard. La zone de 2 000 ha à reboiser abrite encore quelques rares forêts nichées dans les montagnes, caractéristiques des forêts humides de basse altitude de la région Atsinanana. Ces vestiges permettent à une faune de subsister malgré les menaces croissantes. L’un des enjeux du projet réside dans la restauration d’un écosystème forestier permettant d’étendre la surface d’habitat pour cette faune et conserver ces ressources génétiques considérables pour la reforestation de la zone périphérique. En novembre 2021, nous avons pu mener un inventaire faunistique sur 200 ha au sein de la forêt d’Ambohifamotsy avec 2 spécialistes malgaches afin d’évaluer la diversité des espèces présentes, le degré d’endémisme et les statuts de conservation de la faune.


Les techniques d’inventaire


- Méthodes d’inventaire de l’herpétofaune (Amphibiens et Reptiles) : Trois méthodes standards utilisées depuis plusieurs décennies par des chercheurs herpétologistes ont été utilisées, à savoir l’observation directe sur itinéraire échantillon (transect), les systèmes de trou- piège ou pitfall (Raxworthy & Nussbaum, 1994) et les fouilles systématiques des microhabitats. Ces méthodes ont été appliquées afin d’inventorier le maximum d’espèces suivant leur mode de vie.


- Méthode d’inventaire des oiseaux : Vue la difficulté à recenser les oiseaux dans leur milieu naturel, plusieurs méthodes ont été combinées pour inventorier les oiseaux de la forêt d’Ambohifamotsy. Ainsi, trois méthodes de recensement ont été adoptées incluant l’établissement des listes de Mac Kinnon, les observations générales et l’enquête auprès des villageois. Ces trois méthodes ont été utilisées afin d’obtenir à la fois la richesse ornithologique du site et l’abondance des différentes espèces recensées.


- Méthode d’inventaire des Micromammifères : Pour le recensement des mammifères autres que lémuriens, deux techniques de piégeage utilisant des trou-pièges et des pièges standards ont été utilisés. Ces pièges ont été installés des milieux différents pour estimer l’utilisation des microhabitats par ces espèces et pour mettre l’accent sur l’évaluation de la richesse spécifique dans chaque site. La durée de piégeage est de six nuits. 


- Méthode d’inventaire des Lémuriens : pour le recensement des lémuriens, deux techniques ont été utilisées : l’enquête auprès des guides et villageois et l’observation sur transect (Distance sampling) effectuée de jour comme de nuit permettant de calculer la densité et abondance des espèces recensées soit par la vue, soit par l’écoute des cris.


Résultats


Au total, 80 espèces ont été inventoriées dont 6 amphibiens, 19 reptiles, 44 oiseaux et 11 mammifères (dont 4 espèces de Lémuriens). 96% des espèces sont endémiques de Madagascar ou de la région de l’Océan Indien. Cette quantité d’espèces est sous-évaluée pour l’herpétofaune et l’avifaune qui aurait vu ses chiffres grimper si l’inventaire avait pu être mené plus longuement. Il restera donc d’autres espèces à inventorier. 59 individus de lémuriens ont pu être recensés : 28 Lémuriens noturnes (25 Microcebus sp et 3 Cheirogaleus major) et 31 Lémuriens diurnes.

Dans l’ensemble, les espèces inventoriées sont reparties dans les catégories à faible abondance. En effet, plus de 70% des espèces sont groupées dans les catégories « espèce rare », « espèce occasionnelle » et « espèce assez fréquente ». 9 espèces sont qualifiées de menacées selon la liste rouge de l’IUCN (CR, VU, NT) : Oiseaux (Lophotibis cristata, Quasi-menacée - NT et Rallus madagascariensis, Vulnérable -VU), Amphibiens et Reptiles (Zonosaurus rufipes, Quasi-menacée – NT, Uroplatus giganteus, Vulnérable –VU, et Phelsuma masohoala, En danger critique d’extinction -CR), MicroMammifères (Cryptoprocta ferox, Vulnérable –VU), Lémuriens (Cheirogaleus major, Vulnérable –VU, Hapalemur occidentalis, Vulnérable –VU, et Eulemur albifrons, Vulnérable –VU),



De plus, l’inventaire met en avant les risques liés au trafic d’animaux en identifiant les espèces classées sur la liste de la CITES (Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction). 6 espèces sont classées en Annexe I et 14 en Annexe II. La liste I indique les espèces menacées d’extinction dont le commerce international est interdit. La liste II permet d’alerter sur des espèces qui, bien que n’étant pas nécessairement menacées actuellement d’extinction, pourraient le devenir si le commerce de leurs spécimens n’était pas étroitement contrôlé.


- Liste I : Amphibiens et Reptiles dont 2 espèces de Boa (Acrantophis madagascariensis et Sanzinia madagascariensis), Lémuriens (Microcebus sp., Cheirogaleus major et Hapalemur occidentalis et Eulemur albifrons)


- Liste II : Oiseaux (Buteo brachypterus, Falco newtoni, Otus rutilus, Agapornis canus et Coracopsis nigra), Amphibiens et Reptiles (Uroplatus lineatus, Uroplatus giganteus, Phelsuma masohoala, Phelsuma guttata, Calumma nasutum, Furcifer pardalis, Brookesia superciliaris et Mantella laevigata), MicroMammifères (Cryptoprocta ferox)



C’est un travail primordial qui a pu être mené pour confirmer scientifiquement les observations de l’équipe terrain sur la biodiversité existante, et d’identifier les menaces et perspectives d’action pour sensibiliser les populations locales pour lutter contre le braconnage et le brûlis qui détruit la forêt. Il renforce notre conviction de protéger la forêt d’Ambohifamotsy en tant que rare habitat qui contribue significativement à la conservation à l’état nature de ces espèces menacées.


Les mesures de conservation identifiées sont l’élargissement de la forêt par reboisement que nous mettons d’ores et déjà en œuvre, ainsi la stabilisation de la lisière forestière et la réduction du prélèvement de bois.

Diagnostic forestier


Ces deux dernières pistes vont être reprises dans le cadre du diagnostic forestier que nous avons initié fin 2021 avec le recrutement d’un ingénieur français Leonard Stoltz associé au recrutement d’une ingénieure malgache, Diary Nandrianina Randriamora Nasolo, prévue pour début 2022. Cette étude se poursuivra en 2022 à travers des enquêtes terrain et permettra d’identifier avec les populations locales la stratégie d’intervention permettant de freiner la conversion des surfaces forestières en agricoles, ainsi que de réduire la collecte de bois et la pression sur la faune.


Pour plus d'informations sur le projet :


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